La peur de réussir représente une frein concret et peu évoqué dans le développement professionnel. Dans un monde dans lequel le succès est souvent vu comme l’ultime but, la peur de réussir mérite qu’on s’y intéresse davantage.
Avoir peur de réussir : étrange contradiction, n’est-ce pas ?
Pourquoi craindrions-nous d’atteindre ce que nous désirons ardemment ? Mon sentiment est que cette peur, bien que peu abordée, est un phénomène complexe et multidimensionnel.
Imaginons :
Vous êtes solopreneur.e, après des années de labeur, vous vous voyez offrir un projet d’envergure qui pourrait propulser votre carrière.
Au lieu de la joie, vous ressentez une angoisse irrationnelle : « Et si je ne suis pas à la hauteur ? Et si ce succès change ma vie de manière que je ne contrôle plus ? ».
Ça vous est déjà arrivé ?
Moi, oui… plein de fois.
Ces questions, je pense qu’on les partage avec de nombreux solopreneurs, qui se retrouvent à naviguer seuls dans les eaux troubles de l’entrepreneuriat.
La peur de la réussite chez les solopreneurs peut prendre de nombreuses formes :
- la crainte de ne pas être capable de gérer le succès,
- l’anxiété face à l’augmentation des responsabilités
- ou même la peur de perdre l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
Dans cette quête d’indépendance, où chaque décision et chaque succès porte leur empreinte personnelle, la pression peut être écrasante.
Comment cette crainte insaisissable influence-t-elle nos choix de carrière, façonne-t-elle nos perspectives culturelles et affecte-t-elle notre santé mentale ?
Voilà la question que je me pose depuis quelques semaines maintenant.
Je vous emmène avec moi dans ma réflexion sur l’univers des solopreneurs et au-delà, explorant les diverses facettes de la peur de la réussite.
Impact de la peur de réussir sur les choix de carrière
La peur de la réussite est un paradoxe troublant.
Elle se manifeste souvent subtilement, poussant certains à éviter les opportunités de promotion ou à choisir des chemins professionnels moins exigeants, par crainte de l’échec qui pourrait accompagner une réussite plus élevée.
Imaginons Léo, un développeur web indépendant.
Ses compétences sont recherchées, et il se retrouve régulièrement face à des offres de projets d’envergure. Cependant, Léo décline souvent ces opportunités, non pas par manque de compétence, mais par peur des défis et des responsabilités supplémentaires que ces projets impliquent. Il craint peut-être (inconsciemment ?) que le succès ne perturbe son équilibre de vie ou n’entrave sa liberté, un des principaux avantages qu’il valorise en tant que solopreneur.
En soit, c’est son choix et c’est OK. Rien à redire.
Ça devient toutefois plus complexe quand on ‘remet’ en question l’avancement de sa carrière. parce que les conséquences sur le long terme peuvent nous y mener : stagnation professionnelle, regrets potentiels, voire impact sur la croissance personnelle.
Cependant, il est crucial de reconnaître que cette peur n’est pas une fatalité.
Nombre de solopreneurs trouvent des moyens créatifs de surmonter ces défis, notamment en cherchant des mentors, en rejoignant des communautés de croissance, ou en se formant à la gestion du stress et à la planification stratégique.
L’impact de la peur de la réussite sur les choix de carrière est donc à mon sens un sujet complexe, qui implique une multitude de facteurs tant personnels, que professionnels ou même psychologiques.
Et dans tous les cas, il s’avère que la première étape si “la peur de réussir” devient un obstacle, c’est de l’accepter. La reconnaitre, pour ensuite voir dans quelle mesure la transformer en opportunité.
La peur de réussir serait-elle induite par une dimension culturelle ?
Cette peur varie significativement d’une culture à l’autre.
La dimension culturelle de la peur (de la réussite) est aussi diversifiée que les cultures elles-mêmes.
Dans certaines sociétés, la réussite est si fortement valorisée que la peur de ne pas atteindre cet idéal devient un moteur d’anxiété omniprésent.
À l’inverse, dans des cultures où l’humilité et la collectivité sont privilégiées, la réussite individuelle peut être perçue comme une menace à l’harmonie sociale, créant une forme différente de pression.
Nous examinons ici comment différentes cultures perçoivent la réussite et la peur qui l’accompagne.
Note : Ce que j’écris dans cette section n’engage que moi et ma perception actuelle des choses. Je serais d’ailleurs ravie d’en discuter avec vous si vous avez plus de matière sur le sujet.
Selon d’où on vient, comment est-ce qu’on a été élevé, son environnement et son contexte social, notre manière de recevoir la réussite professionnelle (et ses conséquences) peut être différente.
Dans certaines régions du monde, la réussite n’est pas expérience personnelle, elle a aussi une forte résonance culturelle, parfois communautaire.
– Europe
dans le cadre qui est celui dans lequel j’évolue aujourd’hui, la réussite est souvent perçue et accueillie avec un mélange de respect et de réserve.
La réussite professionnelle excessive peut de temps en temps être perçue comme une menace à l’équilibre social.
Dans une certaine mesure, on peut dire que l’humilité est à valoriser.
On doit donc apprendre à naviguer entre aspiration à réussir et besoin d’acceptation sociale. Et disons que ce n’est pas toujours facile de trouver, accepter et assumer son équilibre en ce sens.
– Asie
Dans les cultures asiatiques, j’ai l’impression que la réussite est fortement liée à l’honneur familial et aux attentes sociales.
La pression de réussir peut s’avérer écrasante, mais elle est aussi un moteur puissant. On pourrait penser que la peur de la réussite est puissamment liée à la peur de décevoir les autres et de ne pas répondre aux normes élevées de la société. C’est un point que je peux tout à fait comprendre d’ailleurs.
– États-Unis
La culture américaine célèbre ouvertement la réussite et l’ambition.
Les exemples en ce sens ne manquent pas sur la toile ou même dans notre quotidien.
La pression ici pourrait résider dans le besoin constant de se surpasser. Au-delà d’échouer, réussir implique d’aller toujours plus haut (sky is the limit), de surpasser tout le monde, et… ça pompe une énergie folle !
Je peux comprendre que ce ne soit pas si attirant que ça au final.
D’ailleurs, j’ai comme l’impression que c’est aussi dans cette partie du monde où l’accès aux services psy est le plus démocratisé… (décomplexé? )
– Afrique
Dans de nombreux pays africains (Afrique francophone et pour ce que j’en sais), la réussite est souvent perçue comme un signe de prospérité et de contribution positive à la famille et plus largement à la communauté. On devient un “BOSS”, socialement reconnu et adoubé.
Cependant, cette vision peut aussi entraîner une crainte de l’isolement social ou de l’envie, surtout si la réussite parait se démarquer trop nettement des normes communautaires. On pourrait étendre sa générosité, en s’oubliant dans le calcul, et les retombées ne sont plus à démontrer.
Je me rends compte, après discussions autour de moi, sur ce sujet, que parfois les normes sociétales et familiales façonnent notre rapport à la réussite et la peur qui peut en découler. L’objectif de la démarche ici est de comprendre que la peur de la réussite n’est pas un phénomène uniforme. Elle est comme un un prisme à travers lequel se reflètent diverses influences culturelles.
Il n’y a donc pas à mon sens un médicament ou une seule manière de faire pour y venir à bout si jamais cela impacte considérablement notre développement.
La peur de réussir : quel lien avec la santé mentale ?
La peur de la réussite n’est pas qu’une question de choix de carrière ou de contexte culturel.
Elle a des implications profondes pour la santé mentale, notamment en termes d’anxiété, de dépression et de syndrome de l’imposteur.
Des études montrent que la peur de la réussite peut être liée à une tendance à l’auto-sabotage, et parfois à des troubles anxieux.
Prenons le cas de Marie, consultante marketing. Malgré son succès apparent, elle lutte constamment avec le sentiment d’être une imposteur, craignant d’être « démasquée » pour son incompétence perçue. Cette peur, enracinée dans une vision a priori déformée de la réussite, alimente son anxiété. Elle peut conduire à l’évitement, créant un cercle vicieux.
Faire face à la peur de réussir en 2024
La peur de réussir, bien qu’elle soit souvent moins discutée que la peur de l’échec, peut avoir un impact profond sur notre santé mentale. Reconnaître et traiter les troubles liés à cette peur nécessite une approche multidimensionnelle. N’hésitez donc pas à contacter un professionnel pour vous aider à y voir plus clair. Que cela ne constitue plus un frein ou un handicap pour vous.
Voici quelques points à explorer en attendant.
1. Reconnaissance et acceptation
Commencez par identifier et reconnaître vos sentiments.
- Est-ce que l’idée de réussir vous rend inconfortable ?
- Avez-vous tendance à vous auto-saboter lorsque vous êtes sur le point d’atteindre un succès important ?
Acceptez que cette peur est une partie de votre expérience. La reconnaissance sans jugement est le premier pas vers le changement.
2. Analyse des origines et déclencheurs
Essayez de comprendre d’où vient cette peur de réussir. Souvent, elle est enracinée dans des expériences passées, des modèles familiaux ou des influences culturelles.
Utiliser le journaling pour explorer ces pensées ou chercher l’aide d’un thérapeute peut être très bénéfique pour dénouer ces complexes émotionnels.
3. Stratégies de gestion
Fixez-vous des objectifs atteignables et célébrez les petites victoires.
Cela peut aider à construire la confiance en vos capacités et en votre potentiel de réussite.
Autorisez-vous à réussir, mais aussi à échouer.
Vous n’avez pas la science infuse et vous êtes en pratique permanent sur le terrain de la vie. Alors autant que possible, prenez chaque expérience comme ce qu’elle est : une expérience heureuse ou malheureuse qui viendra consolider votre pratique et certainement votre manière de faire générale.
Pratiquez des techniques de relaxation si vous en ressentez le besoin.
Je ne suis pas une experte, mais je sais aussi qu’apprendre à respirer convenablement m’a aidé à gérer ou du moins mieux appréhender certaines situations anxiogènes.
4. Explorer ses options
- Travailler sur vos compétences peut renforcer votre sentiment de préparation et d’adéquation pour la réussite.
- Trouvez des mentors ou coach de responsabilité, un ou plusieurs partenaires de responsabilité ou encore, rejoignez des groupes de croissance où vous pouvez partager vos expériences et apprendre des autres.
- Encouragez les retours constructifs sur votre travail, ce qui peut aider à voir votre réussite sous un jour objectif et positif.
- Imaginez régulièrement des scénarios dans lesquels vous réussissez.
Cette technique peut aider à réduire l’anxiété liée à la réussite et à vous préparer mentalement à accepter le succès.
En intégrant ces stratégies dans votre vie quotidienne, vous pouvez commencer à transformer votre peur de la réussite en une force pour votre développement personnel et professionnel.
Rappelez-vous, il est non seulement important de viser le succès, mais aussi d’être mentalement et émotionnellement prêt à l’accueillir.
La peur de la réussite est un sujet complexe qui mérite une attention plus approfondie. En la reconnaissant et en l’adressant, nous pouvons non seulement améliorer notre parcours professionnel, mais aussi enrichir notre vie culturelle et personnelle.
Je vous invite donc à réfléchir à votre propre rapport avec la réussite.
- Avez-vous déjà ressenti cette peur ?
- Comment l’avez-vous surmontée ?
Partagez vos expériences, discutez-en autour de vous, et continuons ensemble à explorer ce sujet fascinant.
Ps : j’ai bien aimé cet épisode podcast d’Aline Bartoli sur le sujet, écoutez-le et faites-vous votre propre idée : J’écoute (lis) The Bboost !